Aujourd’hui, je veux parler d’un phénomène qui m’irrite de plus en plus : ces pseudo-experts et expertes qui envahissent les réseaux sociaux, névrosé(e)s de l’informatique qui écrivent des articles sur leur blog, font des streams sur Twitch ou des vidéos YouTube pour donner des leçons d’informatique. On les voit parler de la dernière techno à la mode, répéter des mots-clés en anglais avec des airs savants, se donner des airs de gourous en élevant la voix sur des questions qu’ils semblent être les seuls à comprendre. Mais qu’ont-ils vraiment vécu, ces gens-là ?
Une expérience qui manque de profondeur
Souvent, ces « spécialistes » ont découvert le monde de l’informatique assez tard. Ils ont appris sur le tas, et se sont rapidement engouffrés dans l’engouement des communautés en ligne, où la course à l’existence numérique semble plus importante que l’expérience réelle. Ils n’ont jamais connu les contraintes des gros systèmes, l’immense responsabilité qui vient avec la gestion des données critiques d’une entreprise, ou les nuits blanches à tenter de résoudre une panne de production qui coûte des millions par minute. Ils gèrent des homelabs, le datacenter d’une petite entreprise, le système d’information d’une start-up, d’une association… Et pourtant, ils parlent comme s’ils étaient des vieux routiers de l’IT.
Les réalités du monde de l’entreprise
Les problèmes réels dans les entreprises ne se résolvent pas par des tutos simplistes ou des réflexions superficielles partagées en direct sur un stream. Les solutions, les vraies, demandent du temps, de la réflexion, et une expérience forgée à travers de multiples échecs et victoires. Ces prétendus experts passent beaucoup de temps à soigner leur image par leur présence numérique, mais très peu à approfondir leurs connaissances dans des environnements réellement complexes. C’est déprimant de voir que la valeur semble maintenant se mesurer en abonnés ou en likes, plutôt qu’en années d’expérience ou en projets livrés avec succès.
Face aux véritables défis professionnels
Et que se passerait-il si on plongeait ces mêmes personnes dans une entreprise de taille importante ? Elles seraient perdues face aux contraintes, incapables de naviguer dans les processus rigides de gestion du changement, les normes ISO, ou encore la conformité aux processus ITIL. La collaboration avec d’autres services, le respect du cloisonnement des responsabilités, toutes ces réalités du monde professionnel dépassent largement la portée des streams et des tutos en ligne. Travailler sous contrainte, c’est bien plus que simplement trouver le bon outil de virtualisation ; c’est aussi comprendre les interactions complexes entre les différents acteurs de l’entreprise, et savoir agir avec discipline et surtout humilité.
Une vie réduite à la sphère numérique
Et en dehors de l’informatique ? Eh bien, beaucoup d’entre eux semblent mener une vie étonnamment… vide. Pas de famille, pas de couple. Leur seul bonheur semble être leur présence numérique, cette illusion de popularité et de reconnaissance qui vient avec un follower de plus. Ils vivent pour la toile, et par la toile, comme si l’existence en dehors était un concept trop éloigné. L’informatique est une passion, certes, mais ce n’est pas tout ce qui fait une vie. Une vie pleine, c’est aussi des relations humaines, de l’amour, des moments de partage qui n’ont rien à voir avec la dernière version de Proxmox, ou les likes sur un post technique.
Heureusement, il y a des exceptions
Bien sûr, il ne s’agit pas de tous. Heureusement, certains professionnels relèvent le niveau et possèdent une véritable expérience du terrain. Ces personnes, étrangement, sont beaucoup moins loquaces sur les réseaux. Peut-être parce qu’ils ont une véritable activité professionnelle qui les occupe, des responsabilités qui vont au-delà de la simple quête de popularité en ligne. Ils savent que l’expertise réelle se montre par des actes, pas par des mots, et ils n’ont pas besoin de validation constante sous forme de likes ou de partages. Ils ont une vie de famille, des relations personnelles, et ils comprennent l’équilibre nécessaire entre la vie professionnelle et la vie privée. À titre d’exemple, je suis tout particulièrement Stéphane ROBERT et son site dédié à la culture DevOps, ou Julien Dumur qui m’a apporté beaucoup de réponses sur Nutanix avec son blog perso. Ce sont ces personnes-là qu’il faudrait lire davantage, même si elles sont moins visibles sur la toile.
Les vrais mentors de l’ombre
Je connais personnellement beaucoup de personnes qui m’ont fait grandir professionnellement. Leur niveau dépasse largement ce qu’on peut voir sur les réseaux sociaux comme X. Ces individus, souvent discrets, n’ont aucune présence sur ces plateformes, et pourtant, leur expertise et leurs connaissances sont inestimables. Je pense notamment à Fabien, Bernard, Martin, Nico, Laurent, Phong, Jean-Marc, Erick, etc… qui ont partagé non seulement leurs compétences techniques avec passion, mais aussi la discipline (le bonnes soufflantes de BRS), la résilience, et la compréhension des vrais enjeux techniques. Il y a aussi toutes ces personnes avec qui on travaille (je pense à mes collègues mais aussi à nos amis chez AWS et Snowflake) et qui nous font grandir jour après jour. Ils n’ont pas besoin de followers pour valider leur valeur, car leur succès réside dans leurs accomplissements concrets et leur capacité à impacter positivement les projets auxquels ils participent. Ce sont eux qui inspirent, par leur travail et leur intégrité, bien plus que par des paroles lancées dans un tweet.
Redonner de la valeur à l’expérience
Alors oui, je suis critique, certes, peut-être même amer. Mais il est grand temps que l’on redonne de la valeur à l’expérience et au savoir réel. Que l’on reconnaisse que tout ne peut pas être appris dans son homelab, en suivant des tutos en ligne, que la complexité ne se résume pas à quelques lignes de code, et que la vraie expertise se forge sur le terrain, pas sur les réseaux sociaux. L’informatique est un métier, pas une scène de spectacle pour se faire applaudir par des spectateurs qui ne voient que la surface des choses.
C’est peut-être dur à entendre, mais parfois la réalité l’est. Ce serait bien de voir plus de modestie, et de reconnaissance envers ceux qui, dans l’ombre, résolvent les vrais problèmes.