J’ai toujours aimé transmettre à ma fille ce qui me passionne. Je lui ai appris à faire du vélo, parce que j’ai passé des années sur un BMX. Je lui ai montré le roller (en quad, évidemment) et le skate, parce que ça faisait partie de mon univers. Et plus récemment, je l’initie au pilotage de drone.
Ces savoirs, je les partage avec elle parce que je sais qu’ils lui donneront une meilleure maîtrise, plus d’assurance, et peut-être, un jour, cela deviendra un passion.
Alors, naturellement, je pensais qu’il en serait de même avec l’informatique. Après tout, c’est un domaine qui m’a tant apporté. Je voulais lui transmettre des compétences solides, lui montrer comment fonctionne ce monde numérique qu’elle utilise au quotidien. Mais cette fois, ça ne prend pas.
Elle se sert de la technologie, elle vit dedans, mais elle n’a aucune envie de comprendre comment ça marche. Et ça, je ne l’avais pas vu venir.
Un ami m’a raconté la même chose avec son fils. Pourtant, lui a fini par suivre une école d’ingénieur en cybersécurité. Mais il l’a avoué : ce n’était pas l’amour de la technique qui l’a poussé, mais plutôt un « je veux faire comme papa ». Un mimétisme, pas une véritable passion.
Ma fille, elle, n’a même pas cette curiosité-là. WhatsApp, Fortnite, montage vidéo… Elle baigne dans l’univers numérique, mais elle ne ressent aucun besoin d’en comprendre les rouages. Et face à ça, on se sent un peu impuissants.
Ils ne voient pas le bénéfice immédiat !
C’est ça, le vrai problème.
Nous, on a grandi dans un monde où maîtriser la technologie, c’était avoir un pouvoir, un accès à des choses nouvelles.
Eux, ils vivent dans un monde où tout fonctionne déjà.
Pourquoi apprendre à coder quand ChatGPT peut générer un script en quelques secondes ? Pourquoi comprendre comment fonctionne un réseau quand le Wi-Fi est toujours disponible ?
Là où nous étions obligés de comprendre pour avancer, eux peuvent simplement utiliser. Ils n’éprouvent pas ce besoin que nous avons ressenti à l’époque.
Pour eux, l’apprentissage doit avoir un intérêt immédiat. Ils ne veulent pas apprendre pour anticiper l’avenir, ils veulent apprendre pour répondre à un besoin présent. Si ce besoin n’existe pas, alors ils ne s’y intéressent pas.
Fortnite n’est pas un jeu, c’est un réseau social
Mon vieux poto Imad a eu une réflexion qui m’a marqué :
« Fortnite, ce n’est pas un jeu vidéo, c’est un réseau social pour collégiens. »
Et il a raison. Nos enfants ne sont pas en train de s’intéresser à l’informatique ou à la programmation. Ils utilisent la technologie pour interagir avec leur monde.
Là où nous voyions la tech comme un terrain d’exploration, eux la voient comme un moyen de communication et de socialisation.

C’est peut-être ça, notre erreur : croire que la tech les passionnera comme elle nous a passionnés.
Nous avons appris à comprendre la tech pour mieux l’exploiter. Eux l’exploitent sans se soucier de la comprendre.
Comment leur donner envie d’apprendre ?
On pourrait leur répéter que comprendre l’informatique leur donnera un avantage énorme, mais ils ne l’entendront pas. Pas tant qu’ils n’en auront pas besoin.
Alors peut-être qu’il faut changer d’approche :
- Plutôt que de leur parler d’avenir, il faut leur montrer des résultats concrets, maintenant.
- Plutôt que d’expliquer, il faut partir de ce qui les intéresse déjà.
Ma fille adore les loisirs créatifs et l’impression 3D, mais elle se limite à chercher des modèles tout faits sur Thingiverse. Et si je lui montrais comment modifier ces modèles, ajouter ses propres idées, ou même concevoir un objet de zéro avec un logiciel simple ?
Elle commence aussi à utiliser la tablette pour organiser ses devoirs de groupe, et bientôt, elle devra se mettre à PowerPoint. Voilà une occasion parfaite pour lui apprendre comment structurer ses idées, travailler en équipe de manière efficace, et même ajouter des animations et des visuels impactants.
L’astuce, ce n’est pas de leur enseigner la technique pour la technique.
C’est de leur montrer comment la technologie peut les aider à mieux faire ce qu’ils aiment déjà.
Plutôt que d’imposer un apprentissage, il faut créer le besoin.
Et si on lâchait prise ?
Mais peut-être que malgré tout, ils ne s’y intéresseront jamais. Et peut-être que ce n’est pas grave.
Notre rôle, ce n’est pas de leur imposer un savoir, mais de les accompagner quand ils en auront besoin.
Tout comme un jour, ils sont venus nous voir pour qu’on leur apprenne à faire du vélo, à rouler en quad, à piloter un drone… peut-être qu’ils reviendront vers nous, plus tard, pour comprendre ce qui se cache derrière la technologie qu’ils utilisent.
Et même s’ils ne le font jamais, ce n’est pas grave. Ce qui compte, ce n’est pas qu’ils deviennent des experts en informatique, mais qu’ils sachent que nous serons toujours là pour les aider quand ils le voudront.